Rédaction de portrait par Marianne Olive biographe

Le carré porte bien son nom. Court, moderne, syllabes de la même longueur.

Étrange forme, sans tête ni pieds, si on le fait pivoter, le carré reste identique, mais si on le plie en diagonale, il devient montagne. Alors que la mer, informe, est mouvement, elle s’écoule, s’infiltre, submerge. Et porte également. Des tonnes d’acier et des petits bateaux, comme celui construit des mains des parents de Nathalie Vialars. Née à Madras où son père, fils de délaineur, s’était installé comme intermédiaire en peaux pour la haute maroquinerie, Nathalie Vialars vogua autour du monde entre ses quatre et neuf ans, son petit frère naquit à Tahiti, quel chic ! Le retour à la terre ferme dans la ville de Mazamet, bastion familial niché au pied de la Montagne Noire, est abrupt. Les récits de poissons multicolores et de sables blancs, de Souvaroff et autres îles perdues dans le Pacifique, ne font pas recette. Dans la petite ville, les ultras marines sont trop irréelles, les habitants n’ont vu qu’un morceau du monde, alors que Nathalie Vialars en a fait le tour. La douce quiétude du voyage se débine.

Si ce n’est par la parole, ce sera par le dessin. Le voyage s’exprime enfin par une série de cartes postales de villes pour le projet de fin d’études à lécole ESAG1, puis Hermès, la maison de cuir et de soie commande à Nathalie Vialars l’illustration du fameux carré. La rencontre entre le carré et le voyage provoque des temples, des sphères multicolores, des villes mythiques, Paris, Tokyo, Moscou, New York glissent sur la nuque des femmes, se plient, se froissent. Imagination et coups de crayon habiles sous les toits étroits de Paris. Mais au petit matin, la solitude du créateur use en attendant que les royalties tombent.

L’envie de voyage revient. Nathalie Vialars s’installe en Asie, au sein des grandes patronnes : Shanghai, Hong Kong, Bangkok, mais les dessous ne sont pas aussi chics que l’habit. Faire du créatif, du rythme et de la profondeur, au pays de la contrefaçon c’est un peu comme David contre Goliath. Heureusement la chaîne d’hôtels de luxe Peninsula lui laisse carte blanche pour tout un packaging graphique. Et puis quel choc, un appartement au 35e étage, les particules de pollution visibles à l’œil nu, les taxis empestant le poisson séché qui sillonnent ces villes fourmilières où l’activité du jour continue dans la nuit, sur le Bund les cadres sup occidentaux fêtards noctambules emplissent les restaurants de luxe, au matin à Discovery Bay  on jogge dans la jungle avec vue sur les gratte-ciels de Hong Kong. Vertige visuel et sensuel qui nourrit son inspiration depuis.

2018, nouveau départ à Aix-en-Provence, en France, où l’entrepreneuriat est décidément plus doux. Nathalie Vialars peut créer pour ses clients des illustrations et des graphismes doués de profondeur et de vie où d’une surface plane et nue apparaît un paysage graphique en relief, vif, un voyage visuel empli de surprises.

Heureusement le beau se voit encore.

 

Marianne Olive

NAT CREA

 

 

1 École supérieure des arts graphiques